“The GetDown” c’est la série évènement de Netflix qui repart sur les bases même de l’histoire du Hip Hop, qu’on attend depuis un long moment et qu’on n’a cessé de teaser au cours de ces dernières semaines. C’est aussi la série la plus chère de Netflix avec un budget de plus de 130 millions de dollars. D’énormes moyens ont été déployés, des costumes ultra-léchés, des mélanges d’images d’archives pour récréer assez brillamment (il faut l’avouer) l’ambiance des 70’s. C’est Baz Luhmann à la réalisation et le pari était de savoir s’il ferait mieux que “Empire“, et surtout Vynil, qui sont les 2 dernières séries musicales de grandes envergure proposées récemment.
Il y a énormément de matière et de choses à exprimer, à porter sur l’histoire du Hip Hop, qui est parti d’un simple mouvement de rues.. au courant musical le plus écouté au monde actuellement. Dès le premier épisode, on retrouve le souci du détail de Lurhmann. Il s’approprie les codes de l’époque et on est totalement immergés visuellement dans l’univers à la fois décalé, coloré, mais aussi corrosif de l’époque.
Il y a bien cette odeur de fin de règne du disco, la guerre des clans, les clashs de rues, les mafiosos et ces nombreuses dichotomies, propres à la période, laissent malheureusement place à une histoire plus classique et très “pop” dans l’esprit.
En effet, The Get Down, de par son scénario, reste dans un format très connu. Une tirade qui a déjà fait ses preuves et qui a beaucoup de mal à se renouveler.
Le show met en avant Ezechiel, un brillant adolescent d’origine portoricaine, qui se meurt d’amour pour Mylène, une amie d’enfance, fille de pasteur, qui elle se rêve en reine du disco, et ne veut pas laisser ses sentiments s’exprimer afin qu’ils ne soient un frein à sa carrière. Bien évidemment, le père de Mylène ne veut pas qu’elle fasse de la musique profane…tandis que son oncle, mafioso, l’encourage à cet effet et croit en ses rêves.
Dans le même temps, Ezechiel, éconduit par sa belle, se lit d’amitié avec Shaolin Fantastic…gigolo, débrouillard, qui reste malgré tout un passionné et qui veut par tous les moyens le bon beat pour devenir le maitre des nuits clandestines de New-York: le « get-down », ce « beat » étirable à l’infini, sur lequel le MC pose ses rimes.
C’est très clairement le cas classique de la série pour adolescents… et c’est là le principal point faible de “ The Get Down” qui manque pour le moment de seconds forts. En effet :
- la diatribe romantique entre 2 adolescents qui finiront bien sur ensemble… ou alors joueront au chat et à la souris sur les 40 prochains épisodes
- l’histoire même de la série, qui s’appuie sur la petite histoire de famille, reste extrêmement prévisible (le père, prêtre, qui finira par accepter que sa fille fasse du disco, l’ancien producteur à succès dans le creux de la vague, qui va se relancer grâce à elle, la maitresse d’école qui est attachée à Ezechiel et qui veut absolument qu’il réussisse..)
On se croirait à certains moments dans Glee, tellement tout est conté sur des codes déjà vus, revus et pas de manière très originale car, comme dit précédemment, les seconds rôles forts qui auraient pu être le contre-poids ou soutenir cette histoire ne sont pas encore totalement exploités…
Autre point important qui confirme ceci, c’est le personnage de Mylène et sa voix. Elle en tout point la soeur jumelle de Lea Michelle notamment vocalement. C’est un chant, pop, lisse, sirupeux voire dégoulinant. Aucune chanteuse des 70’s n’a une patte aussi pâle. Elle n’est pas du tout représentative de cette période.. même quand elle chante avec sa chorale, on image pas du tout des chanteuses comme Chaka Khan, Gladys Knight, Patti Labelle, ou même des disco-divas des 70’s comme Gloria Gaynor ou Donna Summer, sonner de la sorte. Là encore, ça sonne faux, le personnage a été très aseptisé, dans une optique de correspondre aux standards de notre époque, qui sont bien inférieurs à ceux des 70’s.
On va dire “pas totalement” car ce n’est que le début de la série; ce ne sont que les 6 premiers épisodes, où il y a effectivement cette envie d’installer le show en touchant très très large pour traiter plus à même des problématiques de manière plus profonde par la suite. On voit qu’il y a une forme de crescendo dans la manière de faire éclore et de présenter le hip hop à une nouvelle génération.
D’ailleurs, dans les faits, les principales bases du scénario sont absolument excellentes. On prend l’église comme première école de la musique et du chant et on y fait bouillir la guerre des gangs, avec des battles, jusqu’au point de rupture pendant l’été 1977, lorsque de nombreux aspirants DJ iront s’équiper en matériel hi-fi à l’œil pour enregistrer leurs mixtapes. Le fait de remettre aussi la communauté latine au centre même de l’histoire du hip hop (alors qu’elle est souvent ignorée) est très bien pensé et toujours dans cet optique de réalisme. Il serait dommage que ces piliers, intelligents, et bien pensés, cèdent sous le poids d’une écriture cheesy et sans grande imagination, destinée à un public très, voire trop, “familial”.
La série dispose d’une bande originale dantesque, d’un décor somptueux et couteux, d’un casting sympa… et tout ça pousse à faire quelque chose de vraiment génial. Il ne faudrait pas qu’il s’enferme dans les clichés de la série pour ados,afin de toucher un large public.
Le “GetDown” mérite quand même bien mieux… et on a envie de leur laisser le bénéfice du doute et de penser que la seconde saison sera meilleure, surtout avec un budget aussi important.
Triste Réalité!